Entre affirmations française et britannique de souveraineté, le titre ancestral autochtone en jeu
DOI :
https://doi.org/10.26443/law.v70i1.1716Résumé
Une grande partie du Canada a été colonisée par la France bien avant l’arrivée des Britanniques au milieu du XVIIIe siècle. Cet article aborde le problème de l’impact de l’affirmation de souveraineté française sur le régime du titre ancestral autochtone reconnu par le droit canadien d’origine britannique. Dans la première partie, l’auteur fait d’abord ressortir une tendance jurisprudentielle consistant à considérer la situation territoriale autochtone qui existait au moment de l’affirmation de souveraineté britannique, plutôt qu’au moment de la prise de possession française, aux fins de l’application du critère du contrôle exclusif sur lequel repose la reconnaissance d’un titre ancestral. Il montre ensuite que cette approche risque de faire échouer les revendications de titre ancestral émanant de peuples dont les ancêtres ont perdu le contrôle exclusif de leur territoire pendant le régime colonial français.
Dans la seconde partie, l’auteur s’attache à démontrer que le droit canadien d’origine britannique n’exige pas la preuve d’un contrôle exclusif du territoire par les Autochtones après l’affirmation de souveraineté française. Il avance que la jurisprudence actuelle repose sur une méconnaissance de l’articulation juridique des titres coloniaux successifs de la France et de la Grande-Bretagne au Canada. En effet, le titre affirmé par la Couronne française constitue le fondement juridique de celui que la Grande-Bretagne a acquis par succession d’État à la faveur des traités franco-britanniques de 1713 et de 1763. Or, exiger la preuve du contrôle exclusif autochtone malgré l’affirmation de souveraineté française est incompatible avec la reconnaissance du titre affirmé par Versailles. Ainsi, en plus de priver de droits territoriaux des peuples autochtones dont le sort aura voulu qu’ils soient d’abord colonisés par la France, cette impasse sur la souveraineté française va à l’encontre des postulats du droit colonial britannique qui consacre le caractère dérivé de la souveraineté de la Couronne sur les territoires canadiens originairement revendiqués par la France. L’auteur conclut que, lorsqu’elle aura à trancher la question, la Cour suprême du Canada devrait par conséquent décider que, dans ce qui fut la Nouvelle-France, c’est le contrôle territorial autochtone antérieur à l’affirmation de souveraineté française qui fondera le titre ancestral.
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